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Les colons de Tarnos : héritiers de la Résistance Juive

Après guerre, chaque été pendant 26 ans, une colonie d'enfants juifs prit ses quartiers dans les locaux du groupe scolaire Jean Jaurès, locaux qui, ironiquement, avaient été réquisitionnés par les soldats de la Wehrmacht pendant l'Occupation. Retour sur cette période symbolique de l'histoire de la Ville...

Exposition réalisée dans le cadre des 70 ans de la rafle des Résistants de Boucau et de Tarnos. 2012 – Réalisation Ville de Tarnos. Documents actualisés et complétés en janvier 2016.

La naissance de la CCE

Créée en 1945 par Joseph Minc, la Commission Centrale de l’Enfance (CCE) fut l’héritière directe des organisations juives de la Résistance, notamment de l’UJRE (Union Juive pour la Résistance et l'Entraide).
Après la Libération, la tâche principale de la CCE fut le regroupement des enfants juifs orphelins de parents déportés ou fusillés. Pour ces enfants, furent créées les Maisons d’Enfants. Pour ceux qui avaient encore un foyer (très souvent une mère seulement), des patronages et des colonies pendant les vacances scolaires furent organisés.

Ainsi entre 1945 et 1988, environ 15 000 enfants ont été accueillis dans l'une des 40 colonies en France et à l'étranger.

La caractéristique des colonies de la CCE fut, dès le début, de mettre en œuvre des méthodes pédagogiques progressistes et novatrices parmi lesquelles la mixité à tout âge (novateur à l'époque !), l'autogestion et l'apprentissage d'une solidarité active, une approche large de la culture par la pratique, des activités sportives collectives, une initiation à la citoyenneté...

La colonie de Tarnos

Après guerre, les élus communistes des villes de Boucau et Tarnos sont rétablis dans leur fonction. Un rapprochement naturel s'effectue entre ces communes, dirigées par d'anciens résistants, et l'UJRE.

Grâce à la Municipalité de Tarnos, la colonie de l'actuel groupe Jean Jaurès est la première colonie de la CCE et voit séjourner plus de 2000 enfants entre 1946 et 1973 (120 enfants par ans de 6 à 16 ans et plus de 80 encadrants).

Les locaux de l'école sont aménagés pour loger les enfants. Les plus petits dorment dans les dortoirs, tandis que les ados logent dans des tentes « marabouts » de l'armée américaine, installées dans le parc.

 Après une nuit de train, les enfants arrivent enfin à la colo

La colonie au quotidien

La santé

Dans l'immédiat d'après-guerre, l'objectif des premières colonies est d'améliorer la santé des enfants qui ont subi des privations durant la guerre. Les enfants reçoivent une visite médicale complète à l'arrivée et au départ de la colonie, ils sont mesurés et pesés chaque jour et leurs rations augmentées en fonction des résultats.

A cette époque encore marquée par le fléau de la tuberculose, on enseigne aux enfants les bienfaits de l'air, de la lumière et de la propreté. La règle d'or des colonies est la suivante : la santé par l'air, l'hygiène et l'alimentation.

Visite médicale obligatoire

Les repas

Les repas sont des moments importants dans la colonie. Les horaires sont scrupuleusement respectés, ils permettent aux enfants de reprendre des forces et de retrouver une alimentation normale. Les repas sont copieux, soigneusement étudiés et préparés, et les moniteurs veillent à ce que chaque enfant se nourrisse correctement.
Afin d'approvisionner toute la colonie, les commerçants du coin sont sollicités quotidiennement et fournissent des rations importantes.

Les enfants à l'heure du petit-déjeuner qui se prend à l'extérieur

Les activités sportives et les jeux

Dans la colonie, les jeux collectifs et les jeux de coopérations sont à l'honneur. Ils sont basés sur une pédagogie de la coopération, de la solidarité, de l'entraide et du partage.
Les activités physiques et les activités de plein air sont centrales.

Une méthode pédagogique novatrice, comment manger une pomme sans se salir les mains...

La plage

La plage de Tarnos (aujourd'hui celle du Métro) permet de nombreuses activités de plein air. Les enfants y vont à pied, ou parfois en camion, car la plage est à plus de 2 km !
Mais si la plage avait ses avantages (soleil sans trop grosses chaleurs, air iodé...), elle avait aussi ses inconvénients. Les rouleaux sont impressionnants et les blockhaus, vestiges du « Mur de l'Atlantique », ne sont pas encore sécurisés et représentent pour les enfants des terrains de « jeux » dangereux.

Les enfants sont prêts à partir à la plage

La culture

La culture occupe une place prépondérante dans le projet éducatif de la CCE. Des méthodes novatrices, comme la liberté active de l'enfant ou le travail de groupe, sont appliquées dans les colonies.

Aussi, sont introduits dans les programmes de la colonie des éléments de la culture Yiddish : chants, danses folkoriques juives, littérature, théâtre...

Les enfants apprennent un chant

Les fêtes

Des fêtes de toute sorte constituent une part importante de l'activité quotidienne des enfants.

La préparation d'une fête, comme celle du 14 juillet, par exemple, permet d'aborder et d'approfondir les connaissances des jeunes sur la période de la Révolution Française. La préparation d'une fête met en œuvre un effort collectif pour préparer les décors, les costumes, les récitations, les chants et danses et de véritables pièces de théâtre.

Des représentants de la municipalité inaugurent une fête de remerciements. Au premier plan, de gauche à droite : Joseph Biarrotte, Jean Goossens, Henri Champagne, François Baudonne et Émile Barrère

Les commémorations

Pour les enfants, participer aux commémorations à Tarnos n'est pas uniquement une question protocolaire ou une marque de respect envers la Mairie accueillante. C'est aussi la continuité logique du travail commencé dans les Maisons d'Enfants et poursuivi dans les colonies, où les éducateurs parlent aux enfants des résistants juifs, qui avaient participé à la lutte armée contre les nazis.

 Lors de la Fête des Pins, qui se tient traditionnellement en juillet à Tarnos, Jacques Duclos, sénateur de la Seine, vient rendre visite aux enfants de la colonie. 1960